01/07 ▒ CLIMAT ▒ "C'est normal qu'il fasse chaud. Stupéfiant d'entendre ces commentaires".
"C'est du jamais-vu !".
Réaction d'Agnès Pannier-Runacher, ministre de la Transition écologique.
Hier, 84 départements ont été placés en vigilance orange canicule.
Aujourd'hui, dès 12 heures, seize d'entre eux vont basculer en vigilance rouge, dont l'ensemble de la région parisienne.
Ce sera également le cas demain.
Météo-France parle de "chaleur suffocante".
Des températures atteignant 40°C sont prévues localement.
Notamment à Paris, Bordeaux et Auxerre.
Dans cette situation, plus de 1 500 écoles ont fermé leurs portes.
Par ailleurs, dimacnhe, l'eau de la Méditerranée a enregistré une température record pour un mois de juin.
Soit 26 degrés.
Cette canicule survient quelques jours après une première vague de chaleur.
Depuis 1947, les canicules se multiplient et s'intensifient en France.
Conséquence directe du changement climatique.
Davide Faranda est directeur de recherche au laboratoire des "Sciences du Climat et de l'Environnement" de l'université Paris-Saclay.
Il livre son analyse sur l'actuelle vague de chaleur.
Extraits.
"Plusieurs facteurs convergent pour rendre cet épisode exceptionnel. En premier lieu, il succède immédiatement à une première vague de chaleur survenue il y a seulement une semaine. Laquelle était déjà précoce avec ses températures élevées. Cette deuxième vague devrait très probablement établir de nouveaux records de températures dans plusieurs villes françaises. Du moins, pour cette période de l'année".
"Cette canicule ne concerne pas uniquement la France, mais l'ensemble de l'Europe méridionale et occidentale. L'Espagne enregistre déjà des records de températures avec 46 °C dans le Sud, tandis que l'Italie a placé une vingtaine de villes en alerte rouge depuis plusieurs jours".
"Enfin, il convient de souligner que nous retrouvons désormais ces vagues de chaleur avec une fréquence quasi annuelle : 2019, 2020, 2022, 2023, 2024 et maintenant 2025. Il s'agit véritablement d'une augmentation de la fréquence, de l'intensité et de l'extension géographique de ce phénomène".
"Nous avons comparé les vagues de chaleur actuelles avec celles du passé et constaté une augmentation de leurs températures moyennes de l'ordre de 2,5°C. Ensuite, nous nous sommes efforcés de déterminer s'il existait un rôle de la variabilité naturelle du climat, en excluant notamment que cet épisode de chaleur soit lié aux différentes phases de fluctuations de température océanique. Ainsi, nous avons pu exclure complètement les facteurs de variabilité naturelle. Ce qui nous permet d'attribuer cette canicule rare au changement climatique d'origine humaine".
"Ceux qui affirment que c'est l'été et il est normal qu'il fasse chaud commettent une erreur. Il est absolument stupéfiant qu'on puisse encore entendre ce genre de commentaires. Je suis abasourdi. Cela devient même une spécificité française. Étant moi-même Italien, Suisse et Français, et collaborant avec des collègues en Espagne, j'ai du mal à comprendre pourquoi ce débat persiste en France, alors que dans ces autres pays, le changement climatique fait l'objet d'un large consensus, y compris parmi les formations politiques allant de l'extrême droite à l'extrême gauche".
"La question n'est plus de savoir si le changement climatique est réel, mais ce que nous entreprenons face à des températures qui mettent déjà en danger la population. Nous savons que les changements climatiques augmentent l'intensité et la fréquence de ces phénomènes. Alors, comment protégeons-nous la population ?".
"L'augmentation de la température globale provoque une modification des courants atmosphériques. L'Europe, de par sa proximité avec la mer Méditerranée et le Sahara, subit une remontée des courants d'air saharien qui commencent à affecter la mer Méditerranée, l'Espagne, l'Italie et la Grèce. Dans cette zone, nous assistons à une accumulation de chaleur humide, qui fait monter les températures de la mer Méditerranée, actuellement transformée en véritable chaudière avec 5°C d'anomalie par rapport aux normales de saison. Toute cette chaleur, qui représente une quantité d'énergie thermique bien supérieure à celle de l'atmosphère, se transfère sur les terres avec la violence que nous constatons aujourd'hui".
"Les habitants des métropoles européennes à forte densité démographique, comme Paris, Londres, Madrid ou Rome, subissent de manière encore plus intense ces vagues de chaleur. Nous observons, dans ces villes, le phénomène d'îlot de chaleur urbain, qui se manifeste particulièrement la nuit. Cela devient véritablement problématique à cette période de l'année où l'ensoleillement est important. Surtout dans des villes comme Paris ou Londres, qui, situées plus au nord, bénéficient de plus d'heures de soleil que Rome ou Palerme. Le béton en est la cause principale. Les bâtiments et les routes ne peuvent se rafraîchir, contrairement à la campagne. Il existe peu de solutions pour remédier à ce problème, hormis la végétalisation des villes. Processus en cours un peu partout".
"Au-delà d'une certaine température, il faut également envisager la climatisation des espaces accueillant des personnes vulnérables : hôpitaux, écoles, transports publics, services de l'État. Certes, c'est une forme de mal adaptation, la priorité devant toujours être la réduction des émissions de gaz à effet de serre pour éviter que la situation ne s'aggrave. Cependant, il faut reconnaître que la climatisation peut soulager les personnes en difficulté".
"Ponctuellement, dans des lieux comme les transports publics, les écoles ou les services publics, qui doivent continuer à fonctionner même en conditions d'urgence, il est important d'y réfléchir. Il est essentiel que des villes comme Paris ou Londres s'adaptent pour que la vie puisse continuer, comme c'est le cas dans d'autres villes du sud de l'Europe, lors des périodes de chaleur".
"Aujourd'hui, nous observons exactement ce que mes collègues avaient prévu il y a trente ans. Cette extrémisation du climat se manifeste sous tous ses aspects : des vagues de chaleur plus intenses, des sécheresses plus sévères, des précipitations et des orages plus extrêmes… Tout s'aggravera. Nous devons nous adapter, non seulement à un climat plus chaud et plus sec, mais aussi à un climat qui devient parfois extrêmement pluvieux. De plus, des rapports montrent que, chaque année, nous dépensons des milliards d'euros pour traiter ou limiter les dégâts causés par ces phénomènes, alors qu'il serait moins coûteux d'effectuer la transition vers les énergies renouvelables. L'impératif devrait être de poursuivre notre quête d'indépendance énergétique en utilisant le nucléaire, qui constitue une énergie décarbonée. Il ne faut, ni s'arrêter, ni régresser".
"Les projections indiquent, malheureusement, que notre budget carbone, soit ce que nous pouvons encore émettre avant de dépasser définitivement cette limite, sera épuisé dans deux ou trois ans sur la base de nos consommations actuelles d'énergies fossiles".
"L'Europe, en dépit des difficultés, a déjà engagé une réduction significative de ses émissions et il est essentiel de poursuivre ces efforts. Renoncer maintenant reviendrait à aggraver les impacts pour les générations présentes et futures".
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