30/01 ▒ SOCIÉTÉ ▒ Quand certains LGBT ne sont pas si enthousiastes que çà...

Au lendemain de la nomination de Gabriel Attal au poste de Premier ministre, plusieurs voix du mouvement LGBT se sont élevées pour appeler à ne pas trop se réjouir de ce choix.

Selon elles, le nouveau pensionnaire de Matignon serait surtout le symbole d’une "normalisation" de l’homosexualité.

Et ce serait dommageable. 

Comment le comprendre ? 

Avancée ou pas ?

"Le Premier ministre est gay, mais pas trop".

La formule, signée Mathieu Magnaudeix, journaliste à "Mediapart" et membre de l'AJL, "Association des Journalistes LGBT", a fait mouche. 

Elle s’inscrit dans un ensemble plus large de réactions appelant à temporiser cet événement.

Un appel à calmer les ardeurs de ceux qui entendent faire de cette nomination le symbole d’une société qui avance, d’une France qui, désormais, accepte à peu près pleinement l’homosexualité.

Pour ceux-là, en propulsant Gabriel Attal à la tête du gouvernement, le président de la République ne fait qu’entériner un état de fait : la société accepte les homosexuels à condition qu'ils soient "rentrés dans le moule et qu’ils ne fassent pas trop étalage de qui ils sont".

"Tant que l’homosexualité n’est pas militante, elle est acceptable" affirme Mathieu Magnaudeix.

"Les faits montrent qu’un Premier ministre gay, c’est désormais possible en France. À condition, toutefois, qu’il ne revendique pas grand-chose sur les sujets LGBT. Et qu’on n’en sache pas trop, non plus, sur sa vie privée".

Donc, si Gabriel Attal est "gay, mais pas trop", c’est parce qu’il ne politise pas son identité. 

Il n’est pas spécialement militant sur la question des droits des homosexuels et il s’est éloigné d’une gauche sensible à ces questions. 

Selon les observateurs, il serait le symbole de la "normalisation d’une identité", qui tend à l’être de moins en moins. 

Loin de l’époque post-68, où être homosexuel passait pour quelque chose de subversif, les enquêtes d’opinion montrent que les homosexuels votent désormais de la même façon que les hétérosexuels.

En 2022, une enquête révélait que les LGBT étaient aussi nombreux que les hétérosexuels à voter pour Marine Le Pen ou Valérie Pécresse.

Pour Didier Lestrade, fondateur de "Act-Up", "c’est en s’institutionnalisant que les homosexuels sont devenus perméables aux idées dominantes".

"Ils ont épousé une simple demande d’inclusion, un simple droit à l’indifférence, jusqu’à finalement se confondre avec la population majoritaire".

Comment le déplorer ? 

Cette normalisation et cette indifférence ne sont-ils pas la garantie de pouvoir vivre normalement, sans discrimination, ni traitement spécial ?

Alain Naze, philosophe, estime que "le droit à l’indifférence se paie d’une homogénéisation sociale. Les vies gays deviennent homogènes aux formes d’existence dominantes dans nos sociétés hétérocentrées. Ce qui ne signifie rien d’autre pour les homosexuels qu’un reniement".

Si par le passé, vivre son homosexualité condamnait à sortir des cadres traditionnels, cela pouvait faciliter une tendance à remettre en question les fondements conservateurs de la société bourgeoise. 

Selon Alain Naze, "avec une institution comme le mariage homosexuel, être homosexuel ne signifie plus rien. La seule chose qui diffère devient le sexe de futurs contractants et non plus leurs valeurs et modes de vie. La visibilité que confère l’accès au pouvoir irait dans le même sens".

Donc, il faudrait être nostalgie des époques où les homosexuels étaient montrés du doigt et rejetés ?

Il faudrait donc rester dans la marge, tout en combattant la tenue à l’écart, les discriminations, le traitement différencié.

On accepterait une différence pleinement reconnue.

Une différence qui ne serait reconnue, respectée et même appréciée par le corps social.

Alors ?

Avoir un homosexuel à la tête du gouvernement ne serait qu'une "tolérance molle et indifférentet.

Et une question persiste.

La volonté de ne pas politiser son identité et de s’insérer dans la société est-elle en train de prendre le dessus ?

Finalement, derrière les débats internes que suscite l’homosexualité du Premier ministre, se joue une vision de la société, que l’on retrouve au sein d’autres mouvements sociétaux, comme le féminisme ou l’antiracisme.

Entre le droit à la différence ou à l’indifférence et la difficulté de se défaire d’une posture purement anti-normative.

Le fait que la question se pose est le signe que nous avons le loisir de nous poser ces questions.

Ce qui démontre, tout de même, que le sujet avance dans une société globalement plus tolérante. 

Le fait que Gabriel Attal soit un Premier ministre homosexuel ne semble pas perturber les Français.

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