17/06 ▒ SANTÉ ▒ La Cour dénonce des hôpitaux trop dépensiers...

Les comptes des hôpitaux publics sont dans le rouge. 

Dans son dernier rapport sur l'Assurance maladie, la Cour des comptes alerte sur "une trajectoire des comptes sociaux hors de contrôle".

Elle s'inquiète d'une "importante aggravation du déficit des hôpitaux publics, passé de 1,9 milliard d'euros en 2023 à un montant estimé entre 2,8 et 3 milliards d'euros en 2024, malgré une reprise de leur activité".

Les pouvoirs publics les ont pourtant massivement soutenus.

Notamment, depuis la crise du Covid.

Les dotations ont atteint 105 milliards d'euros en 2024, afin qu'ils puissent recruter davantage de médecins et d'infirmiers. 

Mais, cela ne suffit pas à équilibrer leurs comptes. 

Les hôpitaux sont donc incités à se serrer la ceinture. 

Alors que les discussions budgétaires commencent pour préparer les lois de financement de la santé pour 2026, la Cour des comptes donnent quelques pistes d'économies qui seraient possibles à l'hôpital.

Sans nuire à sa qualité.

Des économies qui ne vont pas dans le sens des demandes d'Arnaud Robinet, président de la "Fédération des Hôpitaux de France".

Ce dernier demande, au contraire, une augmentation des dépenses garantie par "une loi de programmation pluriannuelle, sur le modèle de ce qui se fait pour la Défense".

Dans la foulée, il a vivement critiqué "ceux pour qui l'hôpital est une cible facile".

Vise-t-il l'exécutif ? 

Sent-il venir une possible cure d'austérité pour les blouses blanches ?

Catherine Vautrin, ministre de la Santé Catherine Vautrin, lui a répondu aussitôt.

Sans prendre de gants.

"Le déficit de la branche maladie de la Sécurité sociale se creuse fortement. C'est aux Français de décider quel argent ils veulent consacrer à la santé ? Tout a un coût !".

Première piste d'économie : éviter les hospitalisations inutiles. 

La Cour des comptes estime que "265 000 hospitalisations en médecine pourraient être potentiellement évitées. Soit 2,5% des séjours. C'est le cas dans le domaine de la prise en charge des maladies chroniques et, en particulier, pour la prise en charge de l'insuffisance cardiaque".

La Cour reproche aux médecins hospitaliers de "ne pas assez respecter la pertinence des soins et d'opérer à tout-va".

"C'est particulièrement parlant dans le domaine de la pose excessive des stents coronaires. En effet, comme le démontre une enquête de l'Institut de recherche et documentation en économie de santé, le taux de pose de stents coronaires varie de un à quatre entre certains départements et certains hôpitaux".

Et la Cour ces comptes d'appeler à plus de dureté.

"L'Assurance maladie doit davantage sanctionner les chirurgiens qui posent trop de stents en dehors des usages de bonne pratique. Cela soulagera les budgets des hôpitaux".

D'autre part, le nerf de la guerre, pour faire de vraies économies, consiste à fermer des petites structures, si elles n'ont pas le niveau de qualité suffisante pour bien prendre en charge les patients.

"Les pouvoirs publics devraient procéder à des regroupements de service au sein des groupements hospitaliers de territoire, notamment en chirurgie, dans l'objectif d'une offre graduée de soins" conseille la Cour des comptes.

Pourtant, fermer des petits hôpitaux est un exercice très difficile en France.

"Lorsqu'une fermeture est envisagée, vous avez souvent des élus qui bloquent les processus de réorganisation, alors même qu'il est très avancé. Ils disent agir dans l'intérêt des administrés. Je l'ai constaté plusieurs fois au cours de ma carrière" explique Stanislas Johanet, conseil en réorganisation hospitalière.

Les comptes de la santé, cette année plus que d'autres, vont-ils entraîner ces fermetures de petites structures ? 

Une loi, votée le 16 mai dernier, ne semble pas aller dans ce sens.

Elle a instauré "un moratoire sur la fermeture des maternités, sauf en cas de mise en danger de la sécurité des patients".

"Ce moratoire est une décision absurde. L'exemple même de l'immobilisme politique" estime Stanislas Johanet.

Alors ?

Quels peuvent être les autres leviers ?

Nicolas Revel, directeur général de l'AP-HP, "Assistance Publique-Hôpitaux de Paris", met en avant celui de "l'amélioration de la qualité".

Il estime qu'il faut "avancer dans la voie de la mesure de l'évaluation et de la transparence en matière de pratiques et de résultats cliniques des établissements. La seule voie efficace pour faire évoluer les pratiques professionnelles est de pouvoir les mesurer et les comparer entre structures équivalentes".

L'objectif serait de mesurer la qualité des hôpitaux et rendre publique cette information.

Quid d'une vraie grande réforme de l'hôpital ?

"Actuellement, les hospitalisations évitées constituent paradoxalement un manque à gagner pour les établissements de santé" constate Nicolas Revel. 

"Un patient hospitalisé constitue une activité pour l'hôpital. Elle est donc payée comme telle par l'Assurance maladie. Au contraire, une attitude préventive et vertueuse ne lui rapporte rien".

Une absurdité totale qu'Emmanuel Macron voulait modifier en janvier 2023.

"L'hôpital et en ville, il faut moins rémunérer à l'acte et davantage au forfait, sur des objectifs de santé publique".

Deux ans après… rien n'a bougé.

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