25/11 ▒ HISTOIRE ▒ Viril, superstar, choyé : ce n'était pas qu'une brute sans cerveau !

Quand, en 2023, Ridley Scott avait tenté de raconter la vie de Napoléon, au-delà de l'accueil mitigé de la presse, les historiens ont froncé les sourcils. 

Non, Napoléon n'a pas tiré à boulets de canon sur la pyramide.

Non, il n'était pas présent lors de la décapitation de Marie-Antoinette, le 16 octobre 1793.

Dan Snow, historien britannique, était largement revenu sur certaines inexactitudes du film.

Ridley Scott lui avait répondu sèchement : "Achète-toi une vie !".

Pourtant, le réalisateur s'entoure de consultants historiques pour la création de ses films, tel que "Gladiator II".

Ridley Scott affirme qu'il veut faire des choix, pas des erreurs. 

Justement, dans "Gladiator II", il cumule des choix osés.

Des choix loin d'être historiques.

Le césar de l'anachronisme revient à la scène où un noble romain sirote ce qui semble être une tasse de café, tout en lisant le journal du matin.

1 200 ans avant l'invention de l'imprimerie ?

Certes, les nouvelles quotidiennes existaient à l'époque, mais elles étaient sculptées et placées dans des endroits spécifiques. 

Quant aux bistrots romains…

Autre point délicat.

Au cinéma, l'entrée des gladiateurs est souvent ponctuée de cette fameuse phrase : "Ave César, ceux qui vont mourir te saluent".

Épique et viril ! 

Sauf que...

Anne Bernet, spécialiste de la Rome antique, assure que "c'est une légende. C'est arrivé une seule fois. Un metteur en scène, qui avait le sens de la formule, a suggéré cela. Ça n'a pas plu du tout, car contrairement à une idée très répandue, beaucoup de gladiateurs n'avaient pas l'intention de mourir dans l'arène".

En outre, les combats de gladiateurs n'étaient pas toujours aussi sanglants qu'on nous le montre.

Ils ne se terminaient pas toujours par la mort d'un gladiateur.

"C'est la chute qui marquait la fin du combat. Pas besoin d'être mort, il devait simplement être à bout de forces ou blessé" affirme Anne Bernet.

"Le sang coulait tout de même souvent dans l'arène. La mort faisait partie des risques du métier. En témoignent les mots gravés sur l'épitaphe d'un gladiateur à Vérone : Je te préviens : celui qui perd, celui-là meurt".

Le cinéma en ferait-il trop ?

Pas toujours.

Les bains de sang ont bien existé, mais souvent dans des circonstances particulières. 

Anne Bernet donne l'exemple des jeux inauguraux du Colisée, autour de l'an 80.

"Là, ce sera un bain de sang épouvantable, qui se reproduira plusieurs fois. Mais, ce ne sont pas des gladiateurs à proprement parler. Ce sont des prisonniers, des milliers de soldats vaincus. On va effectivement les pousser à s'entretuer. Là, il n'y a pas de survivants".

En fait, un gladiateur qui survit, c'est avant tout une question d'économie. 

Le combattant représentait un véritable investissement : des mois d'entraînement intensif, un régime alimentaire surveillé, des soins constants.

Tout cela avait un coût. 

Pas question de les envoyer au casse-pipe à chaque combat ! 

À Pompéi, des inscriptions suggèrent que "seulement 10 à 15% des gladiateurs trouvaient la mort dans l'arène".

Ceci dit, les Romains aimaient le sang ! 

Anne Bernet raconte que Marc Aurèle, réputé pour être une âme sensible, avait été horrifié à la vue d'un trapéziste victime d'une chute spectaculaire. 

Il demanda alors qu'on installe des filets et proposa même de remplacer les armes tranchantes des gladiateurs par des épées mouchetées. 

"Cela a duré une seule représentation. Les Romains voulaient du sang, pas une belle démonstration d'escrime".

Dans ses films, Ridley Scott dépeint les gladiateurs comme des marginaux enchaînés à leur sort. 

Étonnament, la réalité était bien plus glamour.

Certains combattants étaient de vraies stars.

Des idoles aussi adulées que nos footballeurs modernes.

Avec, pour les meilleurs, des salaires faramineux. 

Anne Bernet raconte que, parfois, les spectateurs pouvaient repartir avec un portrait de leur gladiateur préféré, une statue ou même une lampe à son effigie. 

Enfin, certains gladiateurs étaient de véritables sex-symbols.

Ils faisaient tourner les têtes jusque dans les hautes sphères de l'aristocratie. 

À Rome, on entendait parfois ce genre de constat : "C'est drôle, cet enfant ressemble beaucoup à ce célèbre gladiateur mort il y a dix ans, vous ne trouvez pas ?".

Même si personne n'allait sous-entendre que la mère avait été très proche du gladiateur !

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