06|07 ➤ SOCIÉTÉ ➤ Fin de la guerre entre le rappeur et les influenceurs ?

"Je ne parle pas de Booba ou de Magali Berdah".

Cette phrase, prononcée par un fin connaisseur du milieu, résume la sensibilité du sujet. 

Depuis plus d'un an, la dénonciation des dérives commerciales de certains influenceurs a vu arriver un nouvel acteur qui n'était pas attendu sur ce terrain.

Booba, rappeur, est désormais visé par une information judiciaire pour "cyberharcèlement".

Dans ce dossier, tout commence fin 2021.

Marc Blata, ex-candidat de télé-réalité, se moque d'une montre de l'artiste.

Booba s'intéresse alors aux cpmptes de Marc Blata et commence à pointer des placements de produits qu'il juge douteux.

Entre autres, des montres qu'il soupçonne être contrefaites.

"De là, je suis parti en guerre contre lui sur les réseaux sociaux. Et plus je l’allumais, plus j’explorais le monde de merde des influenceurs" déclrait Booba en juillet 2022.

"J’ai découvert le rôle de leur pseudo manageuse, Magali Berdah, la reine de la futilité. Ça m’a donné envie de creuser pour comprendre. Comprendre pourquoi des milliers d’internautes les accusent d’escroquerie".

Depuis, le compte Twitter de Booba est presque exclusivement consacré à ce qu'il appelle les "influvoleurs". 

Parfois, il publie plusieurs tweets par jour sur un même influenceur.

Il appelle à des témoignages, à signaler des comptes ou de possibles arnaques.

Mais, il dérive souvent vers des attaques plus personnelles, comme sur le physique de certaines influenceuses.

Il compare l'une à une "vache", moque les lèvres gonflées d'une autre, etc...

"Au début, c'était de la dénonciation simple. Après, il y a eu beaucoup, beaucoup d’acharnement, parfois même de la désinformation" explique Éric, qui tient la chaîne YouTube, "Le radis irradié", sur laquelle il dénonce aussi des arnaques d'influenceurs.

Et c'est un fait.

Booba a, par exemple, laissé croire qu'il détenait des images d'une prétendue sextape de Magali Berdah.

Marie Peltier, historienne spécialiste du complotisme, observe la construction du récit autour de la critique des influenceurs.

Elle s'intéresse à la manière dont "le harcèlement est devenu une méthode pour imposer des sujets".

"Booba identifie des cibles et ne lâche pas. Contrairement à ce qu'il dit, ce n'est pas seulement de la critique des pratiques frauduleuses, mais des attaques contre les personnes, leur physique. Ces faits peuvent être qualifiés de harcèlement. Il y a la dimension répétée des attaques de Booba, et ce, malgré le fait que les personnes ciblées demandent explicitement que ça s'arrête". 

En janvier dernier, Magali Berdah affirmait que les violences, qu'elle subit en ligne, ont "détruit ma vie".

Le harcèlement est défini, dans le Code pénal, comme "des propos ou comportements répétés ayant pour objet ou pour effet une dégradation des conditions de vie de la personne ciblée, se traduisant par une altération de sa santé physique ou mentale". 

La peine encourue, pour cyberharcèlement, est de deux ans de prison et 30 000 euros d'amende.

"Lorsque Booba tweete, ses propos sont destinés à sa communauté très active, très violente et énorme surtout. Quand on a plus de six millions d'abonnés et qu'on fait des attaques ciblées, on sait ce qu'on fait" analyse encore Marie Peltier.

"Ses méthodes sont violentes. Ce sont beaucoup d'attaques à la personne. Et si on ne rentre pas dans ses méthodes, on devient persona non grata" ajoute un influenceur.

De son côté, Booba se défend de tout harcèlement.

"Le questionnement sur les pratiques de personnalités publiques relève du débat public, éventuellement de la satire ou de la caricature, mais en aucun cas du harcèlement. Je pormets des actions judiciaires contre toutes allégations diffamatoires portant atteinte à mon honneur ou à ma considération".

Un de ses avocats explique que "lorsque Booba s’exprime sur les réseaux sociaux, il est dans le registre de la caricature, de l’humour, de la prise de position".

Sauf que...

Depuis le 1er juin 2023, Booba est visé par une information judiciaire pour "cyberharcèlement, menace de mort matérialisée par écrit et divulgation de données personnelles permettant d’identifier ou de localiser une personne, avec l’intention qu’il puisse lui être porté atteinte".

Cette procédure fait suite à une plainte de Magali Berdah, qui impute l’initiative des campagnes de cyberharcèlement dont elle est victime à Booba.

L’avocat du rappeur dément tout effet incitatif dans ses tweets. 

"Booba s’exprime à titre personnel. Il n’a pas de meute. Booba est un artiste reconnu avec une forte liberté de parole. C’est un lanceur d’alerte".

Ce statut, Booba le revendique depuis plusieurs mois.

"C'est un de mes lanceurs d'alerte. Sans lui, je ne me serais probablement pas impliqué" assure Stéphane Vojetta, député Renaissance.

L'élu, qui a porté la récente loi visant à encadrer les influenceurs, a beaucoup interagi avec l'artiste cette année.

"Booba a agi comme une caisse de résonance. Il a contribué à attirer l'attention d'un public plus large, au-delà du cercle des victimes, par sa communauté de plus de six millions d'abonnés sur Twitter. Je sais reconnaître son rôle et son engagement, mais je ne suis pas totalement en adéquation avec sa manière de procéder. On peut dénoncer un fait sans aller jusqu'à l'insulte".

Au final, certaines personnes, qui dénoncent depuis plusieurs années les pratiques des influenceurs, sont amères.

Elles ont l'impression que seules les méthodes de Booba ont réellement fait bouger les choses. 

"Ce qui me pose problème, c’est qu’il a fallu Booba, qui est à Miami et qui est rappeur, pour que le gouvernement entende les problèmes. C’est honteux. Les problèmes ne sont pas d’aujourd'hui. Quand ils étaient énormes, personne ne s’est saisi" analyse un spécialiste des réseaux sociaux.

Stéphane Vojetta tient un discours un peu différent.

"Il faut reconnaître que, jusque-là, les parlementaires n'avaient pas entendu les alertes qui avaient été lancées. Booba a relayé les messages et les craintes d'une population, qui n'a pas beaucoup de relais vers l'Assemblée nationale".

Aujourd'hui, Booba affirme que son combat est terminé.

Cela n'empêche pas que certaines personnes trouvent "dangereux de parler de lui".

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