30|01 ➫ SOCIÉTÉ ➫ "Il y a eu des conseils de discipline. Ça n'a rien changé".

Aujourd'hui âgé de 24 ans, Adrien a été victime d'agressions homophobes au collège.

Il dénonce le manque d'accompagnement des professionnels de l'Éducation nationale.

Adrien se rémémore des "passages à tabac, des coups de poing dans le visage, dans le ventre".

Le suicide de Lucas, adolescent homosexuel de 13 ans, a ravivé, pour lui comme pour de nombreuses personnes LGBT, le souvenir de ses années difficiles.

Dès son entrée en 6ème, Adrien est harcelé. 

"J'étais plutôt gringalet, pas sportif et avec un côté artistique. Je n'étais même pas encore conscient de mon homosexualité, mais on m'a tout de suite collé une étiquette".

Les insultes sont quotidiennes.

Quand il ne s'agit pas de violences physiques. 

"On m'a craché dessus, jeté des choses à la figure, poussé dans les escaliers. On m'empêchait d'entrer dans le vestiaire des garçons. Plusieurs fois, dans la cour, dans les escaliers ou sur le terrain, on a aussi baissé mon pantalon".

À l'époque, Adrien se confie à ses parents, qui alertent son établissement. 

"Il y a eu des réunions, des conseils de discipline pour ceux qui me harcelaient. Ça n'a rien changé" assure le jeune homme, aujourd'hui étudiant en stratégie et communication digitale.

Il est aussi artiste drag. 

"En gros, ce n'était pas leur problème. Ça ne les préoccupait pas plus que ça".

À partir de là, son quotidien devient un enfer. 

"Ma mère devait venir me chercher au collège, parce que ce petit groupe, toujours les mêmes, habitait dans mon quartier et, à chaque fois que je passais à côté d'eux, ils me tapaient".

Adrien développe alors des stratégies de protection.

Il évite la cour de récréation.

Il veille à ne plus prendre l'ascenseur avec d'autres jeunes.

Il se retourne sans cesse, lorsqu'il marche dans la rue.

"J'étais constamment sur le qui-vive. C'est comme si je m'attendais tout le temps à ce qu'ils s'en prennent à moi".

Inévitablement, ce harcèlement se répercute sur tous les autres aspects de sa vie. 

"Je suis devenu très renfermé. Je n'arrivais plus à sortir de ma chambre et je ne faisais plus confiance à personne. J'ai fait une grosse dépression".

Au collège, il décroche.

Il redouble sa 5ème. 

La situation ne s'améliore qu'au lycée, où le harcèlement cessera véritablement. 

"Aujourd'hui, je suis en paix avec tout ça. J'en ai fait une force".

Le cas d'Adrien n'est pas isolé. 

Après l'annonce du suicide de Lucas, de nombreux LGBT ont partagé leur émotion sur les réseaux sociaux et témoigné de l'homophobie dont ils ont été victimes.

Parfois, dès l'école primaire.

"L’homophobie tue" a ainsi réagi le collectif,  "Éducation contre les LGBTIphobies".

Cette instance, qui regroupe plusieurs syndicats enseignants, a appelé à diffuser, de façon massive, une campagne de sensibilisation dans tous les établissements scolaires.

De son côté, le ministre de l'Éducation nationale a assuré que "la lutte contre le harcèlement scolaire est une priorité du gouvernement".

Interpellé sur le suicide de Lucas, Pap Ndiaye a affirmé que "mon ministère souhaite changer les représentations qui alimentent les haines en favorisant la prévention et l'éducation à la sexualité. Dès septembre dernier, j’ai pris des mesures pour rendre effectifs ces enseignements".

"Il y a un gros travail de dialogue à mener dans les établissements scolaires. Pas que de la sanction" selon Véronique Soulié.

Présidente de l'association, "Estim'", elle intervient régulièrement en école, collège et lycée, afin de sensibiliser à la lutte contre les discriminations. 

Elle assure que "des propos violents et problématiques sont presque systématiquement tenus par les élèves, lors de mes interventions". 

Des propos qui reflètent une vision stéréotypée et une méconnaissance des questions liées au genre ou à l'orientation sexuelle.

Véronique Soulié milite aussi pour que tous les personnels enseignants, comme personnels administratifs ou agents d'entretien, soient formés à ces sujets.

Elle affirme, qu'à l'heure actuelle, ce type de formation dépend encore trop souvent du bon vouloir des établissements. 

"Si le sujet n'est pas pris à bras-le-corps, on n'avancera pas. Et on continuera d'avoir des jeunes en grande souffrance".

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