31|05 ~ ÉCONOMIE ~ "La vraie question n'est pas la notoriété du chef. C'est combien le patron prend".

"Vous préférez être à 110% pendant quatre jours ou à 80% pendant cinq jours ?".

Dans le Nord, Florent Ladeyn, charismatique chef étoilé, n'y va pas par quatre chemins.

Il a séduit ses salariés avec un troisième jour de repos hebdomadaire.

Démarche rare, mais payante contre la pénurie de personnel.

"Embaucher des gens, ça rapporte. Mes serveurs sont des vendeurs. Aujourd'hui, ils sont heureux au boulot, heureux chez eux et vendent plus qu'un mec fatigué" explique Florent Layden, ex-participant de l'émission "Top Chef".

À la tête de quatre établissements autour de Lille, il emploie 65 personnes et vise la centaine cet automne.

Une vingtaine de recrutements est déjà en cours.

En juin 2020, il franchit le pas en offrant, pour le même salaire, un troisième jour de repos hebdomadaire à son personnel.

En plus du dimanche et lundi.

Ce troisième jour est accordé par roulement.

Une semaine, c'est le mardi, la semaine suivante, le mercredi, etc...

"Là, je sors d'un week-end de quatre jours" témoigne Paul, cuisinier de 24 ans.

Il est payé 1 900 euros net pour 39 heures par semaine.

"J'en avais entendu parler, mais je ne pensais pas que la semaine de quatre jours changerait autant ma vie. Je n'avais jamais connu ça en dix ans de métier".

Florent Layden accorde également six semaines et demi de congés payés par an.

Il va également distribuer une participation aux bénéfices.

"Avec trois jours de repos, le salarié se repose plus, écrase les effets des temps de transport domicile-travail, est plus présent avec ses enfants et peut économiser une journée de crèche" analyse Alain Raluy, expert social.

Ceci dit, si nombreux sont ceux qui s'accordent pour dire "cette organisation est une bonne solution pour mieux recruter", elle reste néanmoins marginale.

"Beaucoup d'établissements ont testé la semaine de quatre jours au début du XXIème siècle et en sont revenus. Après plusieurs mois d'observation, ils avaient constaté des effets sur la pénibilité, les erreurs et la qualité globale du service. Le travail étant ramassé sur un temps plus court" explique Alain Raluy.

Selon lui, "les patrons redoutent l'explosion des risques juridiques : des salariés pourraient en profiter pour travailler au noir, un mal sectoriel, lors de cette journée supplémentaire de repos".

Dans l'hôtellerie, cette organisation s'applique déjà largement au travail de nuit.

Florent Ladeyn a un avis bien tranché sur le sujet.

"La vraie question, ce n'est pas la notoriété du chef. C'est combien le patron prend. J'en connais qui empochent 10 000 euros par mois. C'est eux qui galèrent à recruter".

Alors que l'amplitude d'ouverture de ses restaurants tend à se réduire, il se demande également si "l'embauche d'une troisième équipe pour pouvoir ouvrir sept jours sur sept, avec là aussi plus de repos hebdomadaire, n'endiguerait pas la pénurie de personnel".

Conscient des habitudes, il reste optimiste.

"Dans ce métier, on trouve normal de travailler 60 heures par semaine. Si nous on arrive à changer, d'autres peuvent le faire. Dans la restauration, on n'est pas les plus malins et pourtant les chefs se prennent pour des dieux".

Commentaires

Posts les plus consultés de ce blog

07|07 ➤ BOUCHES-DU-RHÔNE ➤ Plongée dans un lieu clandestin peuplé de transgenres...

18/03 ▒ PARIS ▒ Agression homophobe dans un bar...